
Discret, apprécié de tous, engagé dans son travail et pédagogue, incollable en reconnaissance des végétaux, Franck est un agent passionné et inlassable quand il s’agit du monde végétal. Ancien élève de l’école à l’époque où on avait des heures de colle quand on obtenait une note inférieure à 12 sur 20, il y travaille depuis 1996 et connaît parfaitement son environnement. Franck soldera ses congés après la Fête de l’École pour une retraite effective au 1er octobre…
Sarah : Coucou Franck ! Depuis ton arrivée, dans quels secteurs de l’École as-tu travaillé ?
Franck
J’ai pas mal bougé ! J’ai commencé à la roseraie, qui à l’époque était traitée et composée à 100% de rosiers. Dans les années 2000, avec l’arrêt des produits phytosanitaire, il a fallu repenser le secteur. On s’est inspirés d’André Eve* et fait le choix d’intégrer des vivaces. Ensuite, j’ai été au Fruticetum, puis à la Mixed Border, dont j’avais refait toute la configuration. Et là, je suis à la Pépinière depuis 2016-17, où je multiplie des végétaux.
Sarah : Tu es toi-même passé par les bancs de l’École Du Breuil… Quel type d’élève étais-tu ?
Franck
Certains préfèrent la maçonnerie, moi je préfère le végétal. À 16 ans, j’ai fait 2 ans de BEP mécanique, avant de me réorienter vers le jardinage à Du Breuil. J’y ai fait un BEPA en 2 ans, suivi d’une Troisième Professionnelle en 1 an. Ici, j’ai appris le dessin de jardin, les devis, la gestion de chantier et la reconnaissance des végétaux.
C’était la pédagogie des 4 branches : on enseignait le potager/verger, l’arboriculture ornementale, la floriculture et la pépinière.
1/ Construction de la rocaille, 1975 – 2/ Cours de Physique Chimie, 1975 – 3/ Serre chaude, 1975
En ces temps-là, la sélection était rude : à l’examen d’entrée, 50 élèves étaient admis sur 400 candidats. On était aussi plus nombreux : il y avait deux classes de 25 élèves en BEPA. L’École formait davantage de jardiniers pour la Ville : sur 50 diplômés, une vingtaine rentrait à la Mairie de Paris. Aujourd’hui c’est autre chose…
Sarah : Après ton diplôme, tu as directement travaillé à l’École ?
Franck
Non : j’ai quitté l’école en juin 82, et passé les concours. En août 82, je suis rentré à la Ville de Paris, dans le 11e. Quand j’étais au parc de la Roquette de 1981 à 96, on avait participé au Jardin de la Rose (1985). Puis je suis retourné à Du Breuil, où en parallèle de mes activités de jardinier je donnais des cours de taille d’arbuste et de plantes vivaces en SCAP et aux jardiniers de la capitale. J’ai aussi fait des conférences sur les bambous pour les cours du samedi.
1/ Roseraie, 1995 – 2/ Saisonnières, à l’arrière des serres chaudes. Aujourd’hui, 2 tunnels sont à cet endroit. – 3/ Thierry Jourd’heuil*, ancien camarade de promotion de Franck, invité sur un plateau télé.
*André Eve, célèbre rosiériste français, a créé la Roseraie de Morailles à Pithiviers-le-Vieil. Les feuillages dans ce jardin sont aussi importants que les roses elles-mêmes : créant des volumes, des zones d’ombre mettant en valeur les couleurs des fleurs, étoffant leurs silhouettes. Un mélange qui attire depuis de longues années les passionnés de roses, venant du monde entier.
Sarah : Tu as du voir beaucoup de changements depuis ton arrivée !
Franck
Oh que oui ! On est 22 jardiniers aujourd’hui, mais on a été jusqu’à 35… Beaucoup d’activités (et par conséquent de postes) ont été supprimés. Culture de chrysanthème et de potée fleurie, greffage de rosier dans la Pépinière… De même, un paquet de gens travaillait sur la Cour d’Honneur. Un jardin à la française avec beaucoup de fleurs, 2/3 jardiniers sur l’entretien du gazon, aussi fourni et moelleux qu’une moquette ! L’École faisait des concours de décoration florale, et remportait parfois des prix.
Il y avait aussi des corps de métiers, à temps plein à l’École. Menuisier, plombier, cultivateur (qui conduisait des tracteurs pour labourer le sol), magasinier, mécanicien, inventaire, tous ces postes étaient occupés par des spécialistes, et non des jardiniers.

De gauche à droite : 1/ Prix de la méditation « Un jardin dans la gare… un jardin dans la Ville », Gare de Paris-Est Juin 1994 – 2/ 1er Prix « Jardinier amateur », Thiais 1994 – 3/ 3e Prix « Floralies Départementales », Ste Geneviève-des-Bois 1991
1/ Franck à la construction de la Mare (2008) – 2/ Jean-François Perissaud et Jacques Falco, en train de ratisser le foin à l’Arboretum (2008)
Sur une clé USB, j’ai gardé des photo et quelques reportages télé sur l’École, des années 1975 à 2015. Par exemple, j’ai des photos de la construction de la mare aux nymphes Partie Paysagère, en 2008. On l’avait rendue imperméable avec de la terre tanche (toile avec couche d’argile). Sur ces photos, ce sont les meules de foin de l’Arboretum (qui faisait encore partie de l’École.) Il y avait des jardiniers qui travaillaient là-bas, avant leur rattachement au Service de l’Arbre de Paris en 2018-2019.
Sarah : on secteur préféré ?
Franck
Je suis plutôt polyvalent… Mais je n’ai pas encore travaillé aux serres chaudes ni au potager. Je garde un petit œil quand même, bien que je n’aie pas suivi de formation dessus. Mon objectif, c’est de faire un potager dans mon jardin !
Sarah : Un(e) prof qui t’a marqué ?
Franck
Celui qui enseignait l’histoire des jardins : M. Vergely. Il a pas mal voyagé, pour étudier les jardins au Japon, en Chine, dans le monde arabe… Ses cours étaient captivants ! Il y avait aussi les cours de végétaux et aménagement du paysage, avec Alain Bizet. Sophie Meronne venait juste d’arriver en 84 quand j’ai été diplômé !
Sarah : Merci pour toutes ces histoires, et bonne continuation !
Sources : Extraits d’un reportage télé sur l’École Du Breuil, source inconnue, 1975 Extrait d’une émission avec Thierry Jourd’heuil, architecte paysagiste et enseignant à Du Breuil, 1995 Photos : Franck Nosree, Sarah Le Gigan
*architecte paysagiste et enseignant à Du Breuil